La législation du portage salarial: un cadre juridique en constante évolution

Le portage salarial est une forme d’emploi qui permet à un professionnel de bénéficier des avantages du salariat tout en conservant la liberté et l’autonomie d’une activité indépendante. Cette solution innovante connaît un essor considérable depuis quelques années, et son encadrement législatif a évolué pour s’adapter à cette croissance. Dans cet article, nous vous proposons un tour d’horizon complet sur la législation du portage salarial et les dernières évolutions en la matière.

Les origines du portage salarial et son cadre juridique

Le portage salarial est apparu en France dans les années 1980, avec l’objectif de faciliter le retour à l’emploi des cadres expérimentés en leur offrant une alternative aux statuts traditionnels de salarié ou d’indépendant. Il s’est progressivement développé et structuré autour d’un modèle tripartite impliquant le professionnel porté (le consultant), la société de portage (l’employeur) et le client (le donneur d’ordre).

Ce n’est qu’en 2008 que le portage salarial a été officiellement reconnu par la loi, avec l’introduction de l’article L1251-64 du Code du travail. Ce texte posait les bases du dispositif en définissant ses acteurs, leurs rôles respectifs et leurs obligations mutuelles. Toutefois, il s’est avéré insuffisant pour encadrer l’ensemble des situations et garantir la sécurité juridique des parties, d’où la nécessité d’élaborer une législation spécifique.

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La loi du 2 juin 2016 relative au travail et à la modernisation du dialogue social

Après plusieurs années de concertation entre les partenaires sociaux, la loi du 2 juin 2016, dite « loi El Khomri », a consacré un chapitre entier au portage salarial (articles 8 et 9). Elle a ainsi renforcé le cadre juridique en précisant les conditions d’exercice de cette activité, la rémunération minimale du professionnel porté, les garanties sociales dont il bénéficie et les obligations incombant à la société de portage.

Le nouvel article L1254-1 du Code du travail définit désormais le portage salarial comme « un ensemble de relations contractuelles organisées entre une entreprise de portage, une personne portée et des entreprises clientes comportant pour la personne portée le régime du salariat et la rémunération de sa prestation chez le client par l’entreprise de portage ». La loi énonce également que le professionnel porté doit être titulaire d’un contrat de travail conclu avec la société de portage, ce qui lui confère un statut hybride entre celui du salarié et celui de l’indépendant.

Les principales obligations des sociétés de portage salarial

L’article L1254-19 du Code du travail impose aux entreprises de portage salarial un certain nombre d’obligations destinées à protéger les droits des professionnels portés. Parmi celles-ci figurent notamment :

  • L’obligation de s’immatriculer au registre du commerce et des sociétés (RCS) et d’adhérer à un syndicat professionnel représentatif
  • La garantie financière dont doit disposer la société de portage pour assurer la continuité de la rémunération des professionnels portés en cas de défaillance
  • Le respect d’une rémunération minimale équivalente à 70% du plafond horaire de la sécurité sociale, soit environ 2 400 euros brut par mois pour un temps plein
  • La prise en charge des frais professionnels engagés par les professionnels portés dans le cadre de leur mission
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Les droits sociaux des professionnels portés

En vertu de l’article L1254-4 du Code du travail, les salariés en portage bénéficient d’un certain nombre de droits sociaux, tels que :

  • Le droit à une protection sociale complète (assurance maladie, maternité, invalidité, vieillesse, chômage)
  • L’accès à la formation professionnelle continue et aux dispositifs d’épargne salariale
  • Le bénéfice des congés payés et des indemnités compensatrices de préavis en cas de rupture du contrat de travail

Les relations contractuelles entre les parties

La loi du 2 juin 2016 a également précisé les relations contractuelles entre le professionnel porté, la société de portage et le client. Ainsi :

  • Un contrat de travail doit être conclu entre le professionnel porté et la société de portage, précisant notamment la durée de la mission, la rémunération et les conditions d’exercice de l’activité
  • Un contrat commercial (appelé « contrat de prestation ») doit être signé entre la société de portage et le client, définissant les modalités d’exécution de la mission, le prix et les obligations respectives des parties

Il convient de noter que la loi du 2 juin 2016 a également instauré un dispositif spécifique pour les salariés en portage souhaitant créer leur entreprise : le congé pour création ou reprise d’entreprise. Ce dispositif permet au professionnel porté de bénéficier d’un accompagnement personnalisé et d’aides financières pour mener à bien son projet.

Les évolutions législatives récentes en matière de portage salarial

La législation du portage salarial est en constante évolution pour s’adapter aux besoins des professionnels et aux réalités du marché. Ainsi, plusieurs textes ont été adoptés ces dernières années pour renforcer le cadre juridique ou étendre le champ d’application du dispositif :

  • L’ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017, qui a introduit des dispositions spécifiques sur le temps partiel dans le Code du travail
  • La loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018, dite « loi Avenir professionnel », qui a notamment modifié les règles relatives à la formation professionnelle des salariés en portage
  • La loi n° 2019-486 du 22 mai 2019, dite « loi PACTE », qui a assoupli certaines conditions d’accès au portage salarial pour les travailleurs indépendants
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Il est donc essentiel pour les professionnels concernés de se tenir informés des évolutions législatives et réglementaires afin de s’assurer du respect des règles en vigueur et de bénéficier pleinement des avantages offerts par le portage salarial.

En définitive, la législation du portage salarial a parcouru un long chemin depuis les premières expériences des années 1980. Si elle a su s’adapter aux enjeux actuels et répondre aux attentes des professionnels, elle continue d’évoluer pour garantir toujours plus de sécurité juridique et sociale aux parties prenantes de ce dispositif novateur.